30 mars 2024

Le Pouvoir des larmes

Nos premiers pleurs surviennent à la naissance. Ils nous permettent d’accueillir l’air dans nos poumons et d’évacuer ce qui pourrait empêcher l’oxygène de les remplir.
Les pleurs suivants sont le langage non verbal qui nous permettent d’exprimer nos besoins, nos émotions, nos demandes, avant l’apprentissage de la parole. Au fil des années, ils finissent par se limiter à l’expression de certaines de nos émotions, et, selon notre éducation et nos croyances, notre lien aux larmes devient distant, voire inexistant.


Pourtant grandir n’enlève rien au pouvoir des pleurs.

« Pleurer ne veut pas dire que vous êtes faible. Depuis la naissance, cela a toujours été un signe que vous êtes en vie. » Charlotte Brontë

Les émotions sont une expression de notre humanité. Elles accompagnent les expériences que nous vivons. Accueillir et comprendre nos émotions permet d’être en lien avec soi, avec les autres, de mieux se connaître aussi. Elles n’ont rien de négatif en soi. D’ailleurs, nous pouvons pleurer de rire comme de frustration ou de tristesse. Par contre, les réprimer peut générer des débordements qui nous induisent parfois en erreur sur la nature de ces émotions et créent des amalgames enfermant : colère peut se retrouver associée à violence, tristesse à dépression ou négativité. Pleurer devient synonyme de sensiblerie, fragilité, faiblesse, immaturité. C’est ainsi que nous nous retrouvons avec « des bombes à retardement intérieures » qui nous effraient et génèrent de plus en plus « de répression émotionnelle » et donc de pleurs non exprimés (le thème de cet article). Un cercle sans fin.
Lorsque nous démarrons un travail sur nous-même, nous créons un espace pour déposer nos bagages et, idéalement, les émotions qui vont avec. J’aimerais rappeler ici qu’il est nécessaire que ce travail prenne en compte toutes nos dimensions pour mener à une guérison complète (pour mémoire, « guérison » signifie pour moi « ne plus être impacté/limité par les évènements traumatiques du passé »). Tout ce que nous vivons laisse une empreinte dans le corps. Nous pouvons avoir travaillé un dossier douloureux des années durant, si le corps n’a pas été intégré dans la démarche, l’émotion imprimée dans ses tissus reviendra vous chercher.

« Par les larmes, la douleur s’épuise et s’exhale » Ovide

C’est là où le pouvoir des pleurs me surprend toujours, lorsque je fais des rituels de libération par la danse, ou lorsque je viens toucher certaines zones du corps qui sont énergétiquement bloquées par des blessures affectives. Ces pleurs, parfois impressionnant d’intensité, ne sont pas un effondrement mais un cri de l’âme qui a besoin de sortir pour que nous puissions passer à autre chose. Une fin de deuil, une délivrance, une consolation en quelque sorte, qui s’accompagne d’une libération physique -nos poumons se déploient, l’air recircule librement dans tout notre corps – et psychique. Car c’est aussi tout un système hormonal anti-stress qui s’exécute lorsque nous pleurons. Avez-vous remarqué le profond relâchement, voire la fatigue (positive !) après des pleurs versés sans jugement ni censure ?
Accueillir, s’accueillir, être accueilli par un autre, selon si vous avez besoin d’une présence rassurante et réconfortante pour vous autoriser ce moment en toute confiance, c’est aussi un message/ un pouvoir des larmes : le langage non verbal originel qui rappelle que nous sommes vivants et que nous sommes des êtres de lien.

Si vous avez grandi en ayant interdiction de pleurer, si vous vous sentez démuni face à quelqu’un qui pleure, et si vous êtes en travail pour vous réconcilier avec vos émotions et votre histoire, que diriez-vous d’essayer ce petit exercice ?
Je vous invite à prendre un moment calme. Respirez profondément afin de relâcher les tensions et de bien vous poser dans ce moment, puis dites ces phrases, à voix haute, afin que votre corps entende et que tout votre Être soit impliqué :

« J’ai le droit de pleurer.
Je pleure et je relâche les tensions dans mon corps. Avec mes larmes, ce sont mes souffrances, mes colères, mes deuils et mes chagrins qui coulent vers l’extérieur.
Je pleure et je me libère. Mes larmes m’apaisent. Elles m’oxygènent.
Je suis accueilli(e). Je me pacifie.
Je renais. »

Je vous propose de le faire chaque jour (1f/jour), durant une période de 7 à 30 jours selon votre ressenti, sans pression. Observez ce que cela vous fait de dire ces phrases, si les sensations évoluent au fil des jours.

Belle renaissance à vous.

Taïs Roshem

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